LES RENCARDS DE PHIL MARSO

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ISABELLE DE BOTTON : le sexe en grandeur nature

Le rencard est pris dans un café complètement aéré pour cause de porte grande ouverte. allais-je descendre en quatrième vitesse au sous-sol, traîné sauvageument par Isabelle de Botton qui vient de démarrer un spectacle "C'est sexuel" ? Eh bien non ! Isabelle posée et bien sage m'a déballé son amour pour le théâtre. Un moment agréable qui continua bien après la fin de l'interview. Enfin, une nana qui prend le temps.

- Vous avez la réputation d'avoir trempé dans le triolisme avec "Existe en trois tailles" et "Le gros n'avion" avec Mimie Mathy et Michèle Bernier. Aujourd'hui, vous nous la jouez en solo. Est-ce plus excitant ?

Isabelle de Botton : Oui ! Oui ! En réalité je ne sais pas si au jour d'aujourd'hui si c'est plus angoissant, plus excitant. Ce n'est pas une volonté de mégalo d'être toute seule. J'ai eu beaucoup eu de plaisir à jouer avec les filles : Michèle et Mimi. J'ai joué "Brèves de comptoirs" avec six autres comédiens. On m'a proposé ensuite des petits rôles où je restais deux heures en coulisse pour être juste un quart d'heure sur scène. J'aime trop entendre les gens rires, m'amuser sur scène. Je me suis dit : fais-toi ton spectacle et si c'est une réussitte le plaisir sera quadruplé. .

- Difficile de résister à vos formes généreuses que vous montrez sur scène pour l'oeil du spectateur. Est-ce pour vous un atout à mettre en gros plan, ou vous aimeriez que ça soit placé en fond de décor le plus souvent possible ?

I.B : Merci ! Merci ! Quand au départ on veut être comédien c'est pour servir des textes, raconter des histoires, faire rêver. Et petit à petit on s'apercoit que l'on représente une enveloppe corporelle que l'on a du mal a accepter surtout en tant que fille.

- Surtout que le titre de votre spectacle est explicite :

I.B : Je n'arrivais pas à trouver un titre. J'ai fait quelque lecture devant le directeur du théâtre Tristan Bernard qui a eu cette réflexion : c'est sexuel ! J'ai écarquillé les yeux, l'air surpris. J'ai dit : Oui, certes c'est sexuel.Mais encore.... C'est le titre ! J'en ai ri. Cela reste non conventionnelle. C'est peut-être le seul endroit encore provoquant où il y a des forces vives et que l'on ne rentre pas dans le rang. On est à une époque où il y a un grand retour à la morale des idées biens-pensantes. J'ai pas envie ça. Tous les journaux nous parle de "cul" pour parler crûment. Soyez libérée ! Comment garder votre mari ? Alors que dans la vie de tous les jours c'est pas vrai. La sexualité reste un tabou mais c'est aussi un lieu de liberté. C'est ce que j'ai voulu raconter dans mon spectacle.

- Est-ce que vous préférez déshabiller votre âme fémine comme une grande devant une feuille blanche ou faire appel à un, voire plusieurs, complices pour écrire des sketches ?

I.B : C'est grâce à Patrick Bosso avec qui j'ai joué dans "Brèves de comptoirs" en tournée pendant six mois . Il m'a proposé de faire un petit festival à Marseille qu'il organisait. "Allez Isabelle ! Viens jouer.. Tu fais deux, trois sketches et c'est bon. De toute façon cela se passe en famille" me disait-il. Je lui ai répondu qu'il faut un peu plus de conscience professionnelle. Ah ! Ah ! Ah ! Au lieu d'avoir mal au cœur dans le car durant la tournée, je me suis mise à écrire le spectacle. J'étais coupée avec Michèle Bernier avec qui j'adore écrire. On a un projet de série T.V avec d'autres auteurs. "C'est sexuel" est un spectacle que je peu proposer si on me demande de faire quelque chose en attendant de rejouer dans d'autres pièces.

- A vos début, lors d'audition, est-ce qu'une petite voix intérieure vous disais : Vaz-y ma fille, couche ! Tu vas décrocher le rôle pour fermer la porte des WC.

I.B : Ah ! Ah ! Ah ! Euh...Une petite voix ne me disais pas ça mais plutôt : Vaz-y ma fille, ose ! Je suis timide et réservée dans la vie. Alors que sur scène c'est un espace de liberté. On joue un autre personnage. Encore que c'est un leurre car cela nous ressemble. Peut-être que ma bonne éducation ne me permettait pas d'être plus téméraire dans la vie. Il m'a fallu la scène pour oser exploser et avoir une existence peut-être plus calme.

- A première vue votre woman show "C'est sexuel !", mais en regardant de plus près votre déclaration au public d'un soir est de dire : qu'il faut arrêter de se fidéliser à la normalité : enfant, mari, carrière, argent.

I.B : On est tout le temps dans la vie pris entre trois, quatre, six feux. Il faut être une bonne maman, une bonne copine pour son mec. Entre le boulot, l'argent, le mari on est très coincée. Par uniquement les femmes, il se trouve que je parle d'un personnage féminin qui m'est proche. J'ai envie de donner des coups de pieds dans les poubelles, de me remuer, d'être sauvage, rebelle. Cette force vital du bonheur, de plaisir au niveau sexuel est primordial. Il ne le faut pas l'oublier. Malheureusement, on le néglige beaucoup. C'est le propos de mon one man show.

- On dit que le sexe mène le monde. Il y aussi la carte de crédit avec laquelle vous nous susurrez un joli conte sensuel. Alors vous aussi, votre banquier vous la retirée avant que vous en jouissiez abusivement ?

I.B : C'est une partie onirique du spectacle que j'ai écrit en premier. Je raconte le plaisir d'une carte bleue qui prend du plaisir à être débitée et surtout dans les mains d'une femme extrêmement dépensière. L'argent ça brûle et sert au bonheur, au plaisir de l'instant. Pas celui qui sert à asseoir un pouvoir sur les uns et les autres. Dépenser de l'argent pour les impôts c'est beaucoup moins rigolo que pour s'acheter du chocolat, une belle robe.

- Quand les femmes abordent les rapports sexuelles avec un homme dans un sketche c'est toujours catastrophique. Alors, c'est vrai ? On est toujours à la bourre ?

I.B : C'est vrai que dans la vie actuelle on n'a plus le temps. L'intérêt des rapports amoureux c'est que ce n'est pas toujours plat. Il y a des moments formidables, nostalgiques, il y a des retours. C'est sans doute l'a où ça se dégrade de plus en plus. Or, c'est l'endroit où l'on doit être le plus réveillé, c'est dans les rapports sexuels. C'est pas toujours catastrophique !

- On repproche souvent aux comédiennes en France de n'être pas prêtes à tout faire. Par exemple : chanter, jouer la comédie, faire des claquettes, pleurer. Votre plus à vous, est-ce la danse du ventre ?

I.B : Dans le rôle de femme que j'interprête, elle se retrouve propulsée dans un cabaret oriental pour faire la danse du ventre, chose qu'elle ne savait pas. Ce sketche s'incript dans une libération du personnage qui, au départ, est très coincé et qui à la fin arrive à se déhancher, exercice jubilatoire, très sensuel, très érotique sans tomber dans la pornographie. La libération n'est pas uniquement dans la tête, mais aussi dans le corps.

- On dit qu'il vaut mieux une grosse bien pleine qu'une petite à l'étroit. J'entends par là, salle de spectacle. Qu'en pensez-vous ?

I.B : Ah bon... Vous me rassurez. L'important c'est qu'elle ne soit ni grosse, ni petite, mais pleine d'énergie. C'est bien que le comédien et les spectateurs aient envie de faire passer ensemble un petit voyage. Quand vous regarder autour de vous, la mort, la politique, les journaux sont spectacle. Mais personne n'ose se l'avouer. Au théâtre on est d'accord des deux côtés sur la scène et dans la salle pour prendre un moment de spectacle avec consentement mutuel. Alors qu'il y a beaucoup de comédiens qui ne le sont pas de métier et qui nous bouffent la place dans la vie pour des choses plus cyniques, moins drôles, plus hard. Mon premier spectacle c'était un Feydeau, au lycée Pasteur avec Gérard Jugnot, Michel Blanc. Ensuite j'ai joué avec Thierry Lhermitte, et Clavier. J'ai eu une révélation. Etre au théâtre chaque soir, c'est pour moi une vague de chaleur qui monte de plus en plus sur scène. C'est agréable !

Propos recueillis par Phil Marso

© MEGACOM-IK & Phil Marso - Publié le 18 septembre 1997 dans l'hebdomadaire gratuit "Média Pub".

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